Lancer son entreprise c’est un peu comme une histoire d’amour : on y croit, on fait tout pour que ça marche… Sauf que quand ça ne marche pas, c’est difficile à admettre. C’est là qu’intervient la notion de pivot. Alors pivoter, c’est quoi ? Avant toute chose, tout dépend de ce que l’on entend par « ne marche pas » . Est-ce «  pas suffisamment » ? Est-ce « pas comme on le voudrait » ? Ou est-ce « pas du tout ». Dans tous les cas, il faut savoir lâcher prise pour se préserver et aller vers des jours meilleurs. En effet, votre entreprise ne vous définit pas en tant que personne.

QU’EST-CE QU’UN PIVOT ?

Pour faire court, un pivot est un changement de direction que vous décidez d’opérer dans le but d’adapter/réadapter vos produits ou services à la demande de vos clients. Il y a différents pivots possibles : les pivots marché, pivots distribution, pivots monétisation…

QUI A DÉJÀ PIVOTÉ ?

Madyness titre un de ces articles « Le pivot, une étape nécessaire pour les start-ups ? » Car ils sont nombreux à changer de stratégie en cours de route. Et heureusement ! Ils se sont trompés mais ils ne sont pas morts pour autant. Loin de là. Une de mes premières lectures était « On m’avait dit que c’était impossible : Le manifeste du fondateur de Criteo » par Jean Baptiste Rudelle. Il y parle des trois pivots qui l’ont amené à faire décoller Criteo. Et regardez ce que cela a donné ! C’est la même chose pour Nespresso, IBM, Slack… N’ayez pas peur.

POURQUOI PIVOTER ?

C’est une stratégie « Go-to-market ». Rassurez-vous ! Mieux toucher votre marché ne change pas forcément l’ADN de votre projet. Votre « why » (Simon Sinek) peut rester le même. Personnellement, mon Why est de réduire le gaspillage non alimentaire. J’ai décidé de commencer avec la mode via la location de vêtements. Puis, réalisant que cela ne performait pas, j’ai décidé d’adresser le marché en B2B. In fine, lorsque les passagers choisissent une box Lougage, ils testent la location. Ces clients deviendront alors peut-être des adeptes de ce nouveau mode de consommation. Mon why est donc maintenu.

A QUEL MOMENT SAIT ON QU’ON DOIT PIVOTER ?

Il faut le faire le plus vite possible. Pour ma part, cela a mis 12 mois. J’ai réalisé trimestre après trimestre (effet de saisonnalité oblige) que Lougage n’était pas rentable et ne le serait probablement pas avant 10 ans. C’était beaucoup d’énergie dépensée (la mienne mais aussi celle des stagiaires à l’époque) pour un maigre résultat. C’est plus délicat si votre business « marchouille ». Car oui, quand on est au pied du mur, on a pas le choix. Mais quand on avance malgré tout, l’évidence n’est pas si claire. Posez-vous les bonnes questions : est-ce que c’est que j’attendais ? Cela me rend -il heureux ? N’y a-t-il pas un autre moyen d’y parvenir ? Et écoutez les autres ! J’ai identifié le pivot des bagages retardés à un café avec un autre entrepreneur dans un espace de coworking. En 30 min, j’avais mon pivot et sur la route du retour je regardais déjà les chiffres …

AI-JE ENCORE LA FORCE ?

Entreprendre est un marathon et nous sommes capables de puiser dans des ressources jusque-là inconnues. Je ne sais pas comment je tiens encore debout. Fatigue physique, fatigue cérébrale, humeur vagabonde, mauvaise alimentation, auto-culpabilisation… Mais ce n’est pas VOTRE état : c’est l’état dans lequel vous vous mettez VOUS-MÊME pour ce projet. Un pivot peut vous donner un nouveau souffle. J’ai rencontré cet entrepreneur en juillet 2018. J’étais fatiguée et déçue. J’ai eu mon premier rdv avec Air France un mois plus tard (je l’évoque dans l’article travailler avec un grand groupe, c’est comment ?) . J’étais stressée, toujours fatiguée mais très intéressée par le projet. Je me suis stratégiquement préservée jusqu’à la signature du contrat. Bilan : je suis repartie pour 1 an !

LES RISQUES

  • `Le timing : aurais-je dû attendre ? Ai-je laissé tomber trop tôt ? Il faut se fixer des dead lines. Et rien n’est irréversible.
  • Ne pas assumer son échec : Il faut effectivement faire le deuil de son premier concept. Mais sachez que pour pivoter il faut déjà avoir eu une première idée. Votre premier concept est donc en réalité un super tremplin.
  • Il devient difficile de pitcher sa boîte : Oui et non. C’est ce qui fait votre histoire ! Elle est unique. Mais il est vrai qu’il faut un fil conducteur pour être cohérent et ne pas perdre un auditoire en cours de route (voir article le pitch)

LES OPPORTUNITÉS

  • Des avantages financiers : mieux toucher son marché implique, selon moi, des rentrées d’argent plus fructueuses. Une anecdote : il est arrivé qu’en une journée de B2B, nous fassions le chiffre d’affaires d’une année en B2C. J’ai dû me rendre à l’évidence.
  • Redonner une dynamique à l’entreprise : l’équipe ressent votre humeur. Si vous êtes enjouées par le pivot alors elle le sera. Tout comme vous, l’équipe peut en avoir marre et envie de nouveaux défis à vos côtés.
  • Gagner en crédibilité : les investisseurs estiment qu’un pivot est gage de maturité. C’est pareil pour vos pairs ou les médias. En communicant dessus, vous gagnez en crédibilité.
  • Participer à de nouvelles aventures : vous rêviez de participer à tel appel à projet ou événement. Ce peut être l’occasion. Nous avions postulé la BFM Academie en B2C mais n’avions pas été reçus. En B2B, nous avons été sélectionnés ! De nouvelles portes s’ouvrent.

LES IMPACTS , NEXT STEPS

Quand vous savez que vous n’êtes pas au bon endroit, il faut évidemment refaire une étude marché et donc le business Plan qui va avec. Ensuite, vous pourrez peut-être valider votre pivot. Alors, il faudra :

  • Communiquer en interne : Expliquez ce pivot à l’équipe. En ayant connaissance de vos priorités, ils vont pouvoir se réorganiser et participer au plan d’actions préétabli.
  • Communiquer en externe : 
    • Refaire le site internet : Clarifiez votre positionnement
    • Et personnellement, j’enverrais un communiqué de presse. C’est comme lorsqu’on cherche un associé, si on le dit pas, peu de personnes vont se manifester spontanément. Des parutions presse peuvent aider dans votre démarche de nouveaux clients.

J’ASSUME, J’ASSUME PAS ? / OFFICILIASER LA RUPTURE

Que vont dire les autres ? En terme de communication, il y avait deux clans chez Lougage. Moi qui voulais officialiser la fermeture du service B2C et ne plus en entendre parler. Et mon associé qui voulait maintenir les deux. J’ai tranché pour un stop définitif. Cela m’a soulagée d’un poids énorme, m’a recentrée et donné une vraie légitimité en tant qu’entrepreneur. Il est inutile d’alimenter le « vouloir paraitre » il vaut mieux « être ».